Proposition de loi Conseils locaux et intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance (Discussion générale)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les enjeux de la proposition de loi ayant été très bien présentés par Isabelle Florennes, je serai bref.
Je rejoins pleinement le constat de notre collègue : les conseils locaux et intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance constituent des instances précieuses pour nos territoires.
Avant d’en venir à la proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui, permettez-moi de rappeler quelques éléments de contexte.
L’institution d’un CLSPD étant obligatoire dans toutes les communes de plus de 5 000 habitants, on dénombre à ce jour 1 041 CLSPD, contre seulement 301 CISPD, dont la création est facultative.
Les maires et les présidents des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) qui président ces instances fixent respectivement la liste des membres des CLSPD et des CISPD, lesquels comportent des membres de droit et des membres facultatifs. Sont membres de droit le préfet, le procureur de la République et, s’agissant du CISPD, le président de l’EPCI.
Les CLSPD et les CISPD peuvent en outre accueillir des membres facultatifs, afin de prendre en compte des spécificités et des objectifs de politique locale. Peuvent ainsi être désignés membres de ces conseils des représentants des services de l’État, des parlementaires, ainsi que des représentants d’associations ou d’organismes pertinents.
Depuis la loi du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux, ces règles de composition sont fixées non plus par décret, mais par la loi. Or, dans la loi, les présidents de conseil départemental ne sont plus membres de droit, comme ils l’étaient auparavant.
La proposition de loi qui vous est soumise aujourd’hui entend revenir sur cette évolution, mes chers collègues. Au terme des travaux que j’ai menés sur ce texte au nom de la commission des lois, je considère que le rétablissement des présidents de conseil départemental en tant que membres de droit de ces conseils serait une très bonne chose, et cela pour deux raisons principales.
En premier lieu, une telle disposition est cohérente avec les compétences des départements en matière d’action sociale. La loi prévoit en effet expressément que les actions conduites par les départements concourent à la prévention de la délinquance.
De fait, les politiques menées par les départements dans les domaines de l’aide sociale à l’enfance (ASE), de la prévention spécialisée, de l’insertion ou encore de la prévention des violences intrafamiliales apportent un complément précieux aux politiques de prévention de la délinquance.
Pour ne prendre qu’un exemple, plusieurs représentants des communes que j’ai entendus ont évoqué les enjeux liés à la lutte contre la prostitution des mineurs, celle-ci étant elle-même liée à la criminalité organisée, dont l’ampleur ne fait que croître dans de nombreux territoires.
Pour endiguer ce phénomène, le concours des compétences sociales du département, notamment au titre de l’aide sociale à l’enfance, est essentiel. La présente proposition de loi doit donc contribuer à asseoir la reconnaissance du rôle des départements, tout en invitant les départements à se saisir pleinement, s’ils ne l’ont pas déjà fait, de leurs compétences en matière de prévention de la délinquance.
En second lieu, cette disposition favorise le développement d’approches partenariales en matière de lutte contre la délinquance.
Les travaux menés par la commission ont mis en évidence l’importance des bonnes pratiques locales. Les auditions des élus de toutes strates et de toutes étiquettes politiques ont démontré un engagement et une expertise forte pour développer collectivement des stratégies locales qui ne sont pas les mêmes selon le territoire. Les contributions que j’ai reçues de la part des municipalités de Bordeaux, de Vernon, de Montpellier, ainsi que des départements du Cher et de la Seine-et-Marne, ont été très éclairantes.
Le département peut jouer un rôle fort utile d’animation territoriale de ces politiques de sécurité, notamment en orientant ses actions de soutien logistique et financier au bénéfice des communes. À titre d’exemple, certains départements consentent aujourd’hui des efforts substantiels pour financer des équipements de vidéoprotection, au bénéfice notamment de communes rurales qui ne pourraient pas les payer elles-mêmes.
L’admission des départements au tour de table permettra donc de les investir pleinement de ce rôle, tout en assurant une meilleure circulation des informations sensibles, notamment des signaux faibles, comme on dit aujourd’hui, dont les services du département sont les premiers avertis, ce qui contribuera à améliorer l’efficacité de la prévention comme de la répression.
Permettez-moi de conclure par une remarque, mes chers collègues. La proposition de loi qui vous est soumise aujourd’hui illustre les difficultés auxquelles se heurte le législateur lorsqu’il inscrit dans la loi des dispositions qui relèvent du domaine réglementaire.
Une telle méthode conduit en effet à rigidifier les textes et explique que nous soyons réunis pour changer la composition d’une instance locale ! Il eût été bien préférable de laisser cette disposition dans le domaine réglementaire, car il serait alors bien plus simple de rectifier une erreur ou de remédier à un oubli.
En tout état de cause, mes chers collègues, au nom de la commission des lois, je vous propose de réparer cette erreur en adoptant cette proposition de loi.